mercredi, juillet 26, 2006
Noces d’argent de la régate Copa del Rey- Illes Balears
La baie de Palma, avec ses conditions splendides pour la pratique de la voile, se convertit en terrain de régates idéal pour la célébration de la vingt-cinquième édition de la régate la plus importante de la Méditerranée à laquelle participent le roi d’Espagne et le prince des Asturies et autres membres de la famille royale.
La Copa del Rey de voile qui se déroule chaque année dans la baie de Palma est un des événements sportifs les plus importants de l’été. Le roi d’Espagne et sa famille, qui passent habituellement l’été aux Baléares, participent à cette régate comme capitaines ou membres de l’équipage de plusieurs embarcations. Grâce à sa longue expérience, la Copa del Rey s’est érigée en moteur principal des changements et évolutions de la série Classe Croisière de voile. À cet événement, qui se déroulera du 29 juillet au 6 août, Majorque et sa capitale apporteront la beauté de leurs côtes et leur expérience dans le domaine touristique afin d’offrir des journées inoubliables. Cette régate est organisée par le Real Club Náutico de Palma et la Fédération Espagnole de Voile en collaboration avec diverses institutions et entreprises.

http://www.copadelrey.com/
 
samedi, juillet 22, 2006
Inauguration du Musée Robert Graves
Michael Douglas et Catherine Zeta-JonesL’acteur Michael Douglas et son épouse, l’actrice Catherine Zeta-Jones, ont accompagnés aujourd’hui le président du gouvernement des Baléares, Jaume Matas, à l’inauguration de du musée créé dans la maison de Robert Graves. Maison que ce dernier construisit à Deiá en 1932 et dans laquelle il vécu de 1946 jusqu’à sa mort en 1985.

William Graves (auteur de « Wild olives »), fils de l’écrivain, était bien sur également présent. La maison présentée au public est située à Can Alluny, et sa réhabilitation à hauteur de 567 000 euros a été financée par le gouvernement des Baléares. Ce nouveau centre a pour vocation de conserver, renforcer, et diffuser l’héritage littéraireRobert graves à Majorque de l’écrivain britannique, meubles, correspondance, éditions originales, objets qui ont pu faire partie de la vie de l’auteur célèbre pour ses romans, et sa poésie. Graves bâti cette maison à coté de celle de sa compagne de l’époque, la poétesse Laura Riding. Mais il la quitta en 1936, à cause de la guerre civil, et y revint avec sa famille en 1944. Le studio dans lequel il vivait avec la poétesse américaine, a été reconstitué à partir d’une photographie de 1933. La vieille maison, devenue aujourd’hui musée, est proche du centre de Deía à cinq minutes à pied. Les jardins et chemins que l’auteur de « la déesse blanche » créa dans les années 30 ont été conservés à l’identique, de même que les oliviers, dont il obtenait l’huile. Ce qui fût le garage, a été réaménagé en petit auditorium, afin d’y présenter des vidéos et montages. Sans aucun doute, un musée à visiter, afin d’honorer la mémoire de cet écrivain, et certainement un but supplémentaire pour se rendre dans le merveilleux village de Deía, s’il en était besoin.

Ca n'Alluny : Carretera Deià-Sóller s/n 07179 Deià

info@fundacioRobertGraves.com

Tel. +34 971 636 185

Du mardi au samedi 10.00 - 17.00 Dimanche 10.00-15.00

 
vendredi, juillet 21, 2006
Michael Douglas, ambassadeur de Majorque
Michael Douglas est messager de la paix des nations Unies, au même titre que Luciano Pavarotti, Enrico Macias, pour ne pas les citer tous, mais il est également ambassadeur de Majorque sur de nombreux salons touristiques. Cela fait déjà bien longtemps qu'il a installé sa résidence de vacance sur la côte Nord de Majorque non loin de Valldemossa. Oú il aime à se détendre en compagnie de sa famille, et de sa femme la non moins célèbre Catherine Zeta Jones. Promoteur du projet culturel Costa Nord, il se sent trés impliqué dans la sauvegarde du patrimoine de Majorque et de ses traditions, une vocation de philanthrope, inspirée peut-être par l'exemple de l'archiduc Luis Salvador d'Autriche.
 
dimanche, juin 25, 2006
A tout seigneur, tout honneur

Felipe et LaetiziaLa famille royale espagnole est de loin la plus emblématique, parmi celles qui viennent passer la saison estivale à Majorque. Dans leur palais de Marivent, donnant sur Cala Mayor, ils reçoivent les chefs d'état ou les personnalités de passage à Majorque. Cette présence royale, attire bien sûr d'autres têtes couronnées, ainsi nombre de rois ou princes sont ils venus à Majorque, ou prennent carrément leurs vacances ici. C'est le cas du roi Haakon de Norvège, de la Princesse Brigitte de Suède, de Diane de France Duchesse de Wurtemberg ou bien encore du Prince Charles et de la regrettée Lady Diana. Il n'est pas rare de croiser le Roi, ou les infants dans Palma, mais c'est surtout à l'occasion de la Copa del Rey, fameuse régate, que la famille royale déploie tout ses dons pour une de ses passions, le nautisme. Le Prince des Asturies Felipe et Laetizia Ortiz, s'y rendent fréquemment, ainsi que les bien nommés Ducs de Palma. Sans nul doute, cette ambiance royale, contribue au succès de Majorque, et attire la Jet Set mondiale, et de nombreuses fortunes roturières sur son sol. L'aspect insulaire de Majorque et certainement une qualité recherchée, non seulement pour ses ports et mouillages de qualité, mais également pour sa sécurité.La famille royale sur le parvis de la cthédrale de Palma

 
samedi, mai 06, 2006
Jacques 1er d'Aragon, le premier roi catholique de Majorque
Le Début du règne

Jacques 1er le conquérantFils de Pierre II d'Aragon et de Marie de Montpellier fille de Guilhem VII, héritière de la seigneurie de Montpellier, Jacques 1er dit "Le Conquérant" est né le 2 février 1208 à Montpellier. Les Montpelliérains regrettèrent peu Pierre II, qui avait été achever sa vie dans le camp des hérétiques ; mais ils entourèrent de leur amour le roi Jacques, le fils de leur chère Marie, qu'ils avaient eux-mêmes baptisé. Ce baptême avait été singulier : douze cierges pareils, portant les noms des douze apôtres, furent allumés en même temps, celui qui s'éteignit le dernier portait le nom de l'apôtre Jacques.

A l'âge de 5 ans son père décède à la bataille de Muret (1213), bataille opposant le comte de Toulouse, cathare, et l'armée du pape, dirigé par Simon de Montfort. Le jeune Jacques devient prisonnier du pape Innocent III qui négocie sa libération en 1214. Il est placé par les nobles catalans chez les templiers qui assurent son éducation tandis que son royaume est mis en régence auprès de Sanche de Provence, son grand oncle. A 17 ans il prend en main le royaume lui-même.
Son début de règne est difficile : Il doit tout d'abord faire face à la révolte des nobles catalans et aragonais (1225), qui exige de lui des concessions qu'ils obtiennent en partie à la signature d'un traité de concorde entre le roi, les nobles et les villes aragonaises.
Peu après il accorde à Barcelone "l'Acta de Navegacio" qui interdit à tout bateau étranger le droit de charger des marchandises si un bateau catalan est disponible.

Les Conquêtes

A vingt ans il se lance dans un pari risqué. Puisque l'extension de son royaume est impossible vers le Nord, il va l'étendre vers le Sud, sur les terres maures. Pour effectuer ses conquêtes il doit préalablement s'assurer du contrôle des mers, et pour ça supprimer les pirates maures, qui sévissaient à l'époque. Leurs ports d'attache étant à Majorque, il demande aux Corts l'autorisation de former une armée et partir à la conquête des Balèares (1228). Ainsi fut fait, l'île de Majorque tombe (1229), puis Ibiza (1235).

Il se lance en parallèle dans des conquêtes terrestres. Ses troupes, supérieures en nombre, vinrent rapidement à bout d'un vaste territoire, prenant les villes de Morella (1232), Péniscola (1233), Borriana (1233), Puig Ste Maria (1237), Valence (1238), Xativa (1244), Biar (1245) et Murcia (1266). La fondation des royaumes de Valence et de Majorque marque le début de l'expansion catalane sur les mers.

Les actions de Jacques 1er

C'est sous le roi Jacques que le roi de France, maître du reste du Languedoc, s'immisça dans les affaires de la seigneurie de Montpellier. L'évêque de Maguelonne fut amené par l'habile Gui Folencis, agent de la reine Blanche de Castille, à reconnaître que la ville de Montpellier et ses dépendances avaient toujours appartenu au roi de France, et, en 1255, il prêta serment de fidélité comme feudataire de la couronne ; de sorte que le roi d'Aragon, vassal de l'évêque de Maguelonne pour Montpellier, se trouva lui-même indirectement soumis à la suzeraineté du roi de France.
Palais des rois de Majorque à PerpignanJacques 1er ne s'est pas contenté d'agrandir considérablement son royaume, il l'a également structuré. En Roussillon il a fait agrandir les ports de Collioure et de Port Vendres, puis il a amélioré la charte de la ville de Perpignan que son père avait signé : en plus du battle (Maire) et de 5 consuls, 12 conseillers vont être élu pour les seconder. Pour les réunir Jacques 1er fait construire l'hôtel de ville en 1270.
Parallèlement, pour éviter les exactions à l'encontre des juifs, il créé un quartier, à Perpignan, qui leur est dédié : Le Call. Ce quartier, situé à proximité du couvent des Minimes, était physiquement séparé du reste de la ville par de grands murs, un seul portail leur donnant accès. Initialement havre de paix, ce lieu est malheureusement assez rapidement devenu un ghetto.
Il fait également fortifier la frontière Nord, c'est de cette époque que date la Salveterra (château d'Opoul), les remparts de Vinça (1245), ceux d'Ille sur Têt (1244), etc. La frontière devient officielle à la signature du traité de Corbeil (1258), elle s'arrête aux villages d'Opoul, Vingrau, Estagel, Montner, Néfiach, Ille sur Têt, Rodès, Tarérach, Molitg les bains, Mosset, et Puyvalador.
L'activité diplomatique de Jacques 1er est intense. Il envoi des ambassadeurs tout autour de la Méditerranée, en Arménie (1265), en Perse (1268) à Constantinople (1269). Il va même jusqu'à faire créer un poste de consul des catalans à Alexandrie (1264).
Jacques le Conquérant renforce le pouvoir royal en menant avec fermeté la normalisation du droit dans chacun des territoires de la couronne d'Aragon. Il charge ainsi l'évêque d'Osca, Vidal de Canyelles, de codifier le droit coutumier du royaume d'Aragon, entreprise qui aboutit lors des cortes d'Osca de 1247, qui imposent un droit unique au royaume au-dessus des droits particuliers. En Catalogne, ce sont les Usages de Barcelone qui s'imposent peu à peu à tout le pays. Enfin dans le royaume de Valence, le roi accorde une ordonnance de gouvernement en 1251, révisée en 1271, les Foris (fueros) et consuetudines Valentiae . D'autre part, il développe le système des corts ou cortes, des sortes de parlements généraux, réunissant des délégués nobles, ecclésisastiques et citadins autour du roi. Chacun des royaumes de la couronne a ses propres corts, exepté le royaume de Majorque, qui envoie des délégués aux corts de Catalogne.
Sur le plan de la politique extérieure, il signe avec le futur Saint Louis le traité de Corbeil en 1258, qui fixe la frontière entre le royaume de France et la couronne d'Aragon aux Corbières. Saint Louis renonce à tous droits de suzeraineté sur les comtés de Barcelone, de Roussillon et de Cerdagne. Jacques Ier renonce à tous droits sur les comtés du Languedoc, à l'exception de la seigneurie de Montpellier qui lui vient de sa mère.

Fin du règne

En 1275 eut lieu une révolte maure dans le Sud. Alors que son fils, l'infant Pierre, la réprimait, Jacques 1er meurt à Valence le 27 juin 1276. Il est enterré à Poblet, près de Tarragone.
Ses conquêtes seront poursuivies par ses successeurs et les catalans continueront à se déployer tout autour de la Méditerranée dans les siècles à venir. Son règne aura marqué le départ de l'âge d'or catalan.
 
lundi, mai 01, 2006
Ramon Lull, une lumière majorquine du moyen-âge..


Raymond Lulle naquit à Palma dans l'île Majorque en 1235. Son père, sénéchal de Jacques Ier d'Aragon, le destinait à la carrière des armes. La jeunesse de R. Lulle fut turbulente et licencieuse, le mariage ne modifia pas sa conduite, mais à la suite d'un violent amour terminé d'une façon malheureuse, il renonça au monde et après avoir partagé ses biens entre ses enfants, il se retira dans la solitude. C'est alors qu'il forme le projet de convertir les infidèles. Ce sera là la grande idée à laquelle il consacrera toute sa vie. Pour apprendre l'arabe, il achète un esclave musulman mais celui-ci ayant deviné le but de son maître, tente de l'assassiner. A peine rétabli, Lulle fonde un monastère où l'on enseigne l'arabe et où l'on forme des missionnaires. Puis il parcourt l'Europe s'adressant aux papes, aux rois, aux empereurs, demandant aux uns leur autorité morale, aux autres du secours en argent pour faire fructifier son oeuvre. C'est dans ces pérégrinations qu'il se mit en relations à Paris avec Arnauld de Villeneuve et Duns Scot. Il visite l'Espagne, l'Italie, la France, l'Autriche. Joignant l'exemple à la parole, il passe deux fois en Afrique, est condamné à mort à Tunis, et n'échappe que grâce à la protection d'un savant arabe qui l'avait pris en affection. En 1311, nous le trouvons au concile de Vienne. C'est là qu'il reçut une lettre d'Edouard II. Ce prince, se montrant favorable à ses projets, R. Lulle va en Angleterre. Le roi le fait enfermer dans la tour de Londres et le force à faire le grand-oeuvre. R. Lulle change en or des masses considérables de mercure et d'étain, cinquante mille livres, dit Lenglet Dufresnoy. De cet or on fit les nobles à le rose. Craignant pour sa vie, R. Lulle s'échappe de Londres et retourne en Afrique. A peine débarqué, il se met à prêcher, la populace indignée de son audace le lapide. La nuit suivante des Gênois l'enlevèrent respirant encore de dessous un monceau de pierres et le portèrent à bord de leur vaisseau, mais il mourut en vue de Palma ; il fut enterré dans le couvent des franciscains de cette ville (1313).
 
George Sand, un hiver à Majorque...
Certainement le livre le plus vendu à Majorque, « un hiver à Majorque » de George Sand est un récit de voyage peu commun, ou elle met en scène la magie des lieux.
Pour ceux-ci, George Sand sait se montrer bon public : « [on] ne saurait faire dix pas dans cette île enchantée sans s'arrêter à chaque angle du chemin, tantôt devant une citerne arabe ombragée de palmiers, tantôt devant une croix de pierre, délicat ouvrage du XVe siècle, et tantôt à la lisière d'un bois d'olivier ».

Majorquines et Majorquins sont traités avec moins d'indulgence : « Les hommes ne lisent pas, les femmes ne cousent même pas. Le seul indice d'une occupation domestique, c'est l'odeur de l'ail qui trahit le travail culinaire ; et les seules traces d'un amusement intime, ce sont les bouts de cigare semés sur le pavé. Cette absence de vie intellectuelle [...] donne au Majorquin plus de ressemblance avec l'Africain qu'avec l'Européen. »
Reste l'écriture. George Sand y donne le meilleur d'elle-même, ne dédaignant pas le recours au fantastique pour enjoliver ses fréquentes déconvenues, en accentuer le pittoresque.
Paris fit bon accueil aux souvenirs de George Sand ; ce ne fut pas le cas au-delà des Pyrénées où ils suscitèrent de violentes polémiques.
Vous pouvez lire "un hiver à Majorque" en cliquant sur le lien suivant :

http://www.gutenberg.org/catalog/world/readfile?fk_files=163925

Résumé du voyage :
L'arrivée à Palma:
Les cinq voyageurs arrivent à Barcelone, où ils logent à l'hôtel des Quatre-nations. En dehors de Chopin et de Sand, il y a les enfants de George, Maurice âgé de quinze ans, Solange âgée de dix ans et leur domestique Amélie.
Le 7 novembre au soir ils embarquent tous les cinq sur un petit cargo " El Mallorquin " et ils débarquent le lendemain en fin de matinée à Palma. Immédiatement ils sont séduits par le coté pittoresque de l'île ou le soleil brille comme en juin à Paris.
Une première déception les attend. Il n'y a plus une chambre de libre, dans les hôtels de Palma et ils se décident finalement à louer un petit meublé dans une auberge des bas quartiers de Palma.
Malgré des lettres de recommandation que possèdent George, leurs " amis espagnols " ne se précipitent pas pour leur venir en aide et c'est le consul de France à Palma, Pierre Flury qui leur indique la possibilité de louer un appartement non meublé à la Chartreuse abandonnée de Valldemosa située à une quinzaine de kilomètre de la ville.
Chopin et Sand furent enchantés par le site de la Chartreuse. En attendant l'arrivée des meubles, ils louèrent une petite villa au milieu des collines d'où il pouvait voir la mer et la cathédrale de Palma, dans laquelle ils emménage le 15 novembre.
C'est le bonheur ! Chopin écrit à Fontana;
" Je suis à Palma, au milieu des palmiers, des cèdres, des cactus ....du soleil toute la journée. Tout le monde est vêtu comme en été car il fait chaud. La nuit on entend des chants et le son des guitares pendant des heures entières."
Chopin n'ayant toujours pas reçu le piano Pleyel qu'il attendait, il déniche sur place un " instrument " dont la sonorité le contrarie en permanence... Malgré cela il travaille, termine la polonaise en Ut mineur, met la dernière main à son cycle de préludes déjà commencé. Tout va pour le mieux. Chaque jour ils font de longues promenades et leur amour est au beau fixe.

L'installation à la Chartreuse:

A cause d'une grosse bronchite attrapée au cours d'une promenade ventée et pluvieuse, la nouvelle de la maladie de Chopin se répand comme une traînée de poudre dans la moitié de l'île... Ils doivent quitter la villa sur le champ et payer pour la désinfection des murs. Hébergés pendant quatre jours chez le consul, il emménage le 15 décembre à Valldemosa. En arrivant, Chopin décrit son nouveau logement à Fontana. "Entre les rochers et la mer, dans une cellule d'une immense chartreuse abandonnée ".
L'ordre des Chartreux ayant été dissous deux ans auparavant, la chartreuse est inhabitée, et assez insalubre. D'autre part le piano que Pleyel a envoyé à Chopin est resté bloqué au port, car la douane réclame une forte somme d'argent. Ceci fait dire à Chopin :

" Ici la nature est bienfaisante, mais les hommes sont voleurs" .

Ce n'est que début janvier 1839 que le piano est enfin installé dans la cellule de Chopin. Son arrivée permet à Chopin d'épancher sa soif de jouer et le "clavier bien tempéré" de Bach résonne sans doute, haut et fort dans la chartreuse...
Il reprend son travail de compositeur, achève quelques préludes, avance la Ballade en fa majeur... Malgré cette amélioration morale, une douleur dans la poitrine le cloue au lit de temps à autres.
C'est sur les épaules de George que retombent toutes les obligations. Elle donne tous les jours des leçons à ses enfants, s'occupe de Chopin souffrant, fait les courses à Palma, prépare les repas, car Frédéric ne supporte pas la nourriture espagnole... (sans doute à cause des fritures à l'huile d'olive, car jusqu'à ma première visite en Espagne en 1964 c'était presque la seule façon de cuisiner)...

Le quotidien:

Les habitants de l'île sont franchement hostiles envers ses étrangers bien curieux. La nouvelle que Chopin et George ne sont pas mariés, qu'ils ne prient pas à l'église, qu'il passe son temps à jouer du piano et elle, à fumer des cigarettes ou des cigares, tout ceci joue en leur défaveur.
Pour couronner le tout c'est le début de la période des pluies, et les désagréments atteignent leur comble. Chopin qui n'arrive toujours pas à se remettre de sa bronchite, a le moral au plus bas. Ce voyage est un fiasco complet..
Son moral désastreux lui fait prendre des colères terribles et même ses amis n'y échappent pas.. Les seules nouvelles qu'il obtient au compte goutte lui arrivent par l'intermédiaire de Fontana. Malheureusement c'est pour lui apprendre que son banquier Auguste Léo lui réclame de l'argent. Début janvier, Chopin envoie le manuscrit des polonaises op 40 en la majeur et en ut mineur ainsi que les Préludes à Fontana. Un peu à cours d'argent ils vendent le Pleyel à la femme du consul Fleury, et décide de rentrer dès que possible en France.
Le Retour en France:

Le 13 février 1839, après trois heures de carriole sur des chemins défoncés et ravinés par les pluies, ils arrivent à Palma. Dès son arrivée Chopin se remet à cracher le sang, mais ils embarquent à nouveau sur El Majorquin. La traversée pour le retour est beaucoup moins agréable qu'à l'aller. Chopin, Sand et les enfants sont installés dans une cabine sous le pont avec ordre de ne pas en sortir. La cabine est minuscule et l'air vicié. A la place de respirer l'air pur de la mer, ils sentent l'odeur des porcs et entendent leur cris de douleur car les marins les fouettent afin d'éviter que les animaux ne se couchent.. Chopin passe une nuit blanche et se remet à cracher le sang. Arrivé à Barcelone, le capitaine leur interdit de quitter le bord tant que les porcs ne sont pas tous débarqués. C'est George qui se débrouille pour appeler de l'aide, et le capitaine du bateau français "Le Méléagre" vient les chercher et emmène immédiatement Chopin chez le médecin... Quelques jours plus tard ils débarquent à Marseille. George écrit à Mme Marliani: " Un mois de plus et nous mourions en Espagne, Chopin et moi; lui de mélancolie et de dégoût, moi de colère et d'indignation.....ils ont percé d'épingles un être souffrant..."

" Si j'écris sur eux ce sera avec du fiel…".
 
Mais qui était l'archiduc Luís Salvador ?
Louis-Salvador de Habsbourg-Lorraine



En tant qu’héritier de la branche de Toscane de la maison Habsbourg-Lorraine, il a bénéficié d'une éducation plus libérale que de coutume. Elle faisait appel à la modestie, à la force de travail et à l’intelligence, en bref aux vertus qui devaient marquer de façon décisive sa vie d’adulte. Au lieu de l'étiquette de cour, le jeune archiduc aimait mieux s’adonner à l’étude de la nature et des langues et s’occuper de son chimpanzé Gorilla. Quand la famille dut quitter Florence en 1859 suite aux mouvements révolutionnaires et s’établir au château de Brandýs nad Labem Brandeis près de Prague,il sembla tout d’abord que Louis, assoiffé de culture, dut se préparer à de hautes fonctions politiques. Mais le jeune homme, lucide, reconnut bientôt qu'il n'était pas fait pour une carrière de fonctionnaire ou de militaire.

Appel de la mer :

De nombreux voyages dans sa jeunesse lui avaient donné le goût de la mer et des pays du Sud. Après que l’empereur lui eut donné congé, en 1867, Louis-Salvador, sous le nom d'emprunt « Ludwig comte Neudorf », se rendit pour la première fois aux Baléares dans le cadre d’un voyage d’étude scientifique. La beauté sauvage de la plus grande des îles, Majorque, et l'amabilité de ses habitants l’impressionnèrent si fort que, trois ans plus tard, il considéra cette île comme sa patrie d’adoption. Fier possesseur « du brevet de capitaine au long cours », il acheta le Nixe, bateau de 51 mètres de long qui, de son propre aveu, était sans conteste sa vraie maison.
« La passion des voyages est innée en l'homme. Seulement, notre civilisation, les nombreuses contraintes que l’homme s’impose, ont apporté la sédentarité et il n'est pas possible de suivre cet instinct naturel, sauf avec le Yacht. On peut avoir à bord sa propre activité, soit littéraire, soit artistique, soit scientifique, et s’y consacrer le plus activement possible avec tous les moyens nécessaires pour cela et aussi, de temps en temps, détendre son regard par de nouvelles images, ce qui est, en quelque sorte, un moyen de s’aérer l’esprit. Par le biais de nouvelles promenades et de nouvelles excursions, on crée le moyen de se reposer pendant le travail ce que l'on chercherait vainement avec un domicile fixe. »

Voyage de découverte :

Avec son « ondine bien-aimée », l'archiduc a sillonné la Méditerranée des décennies durant, généralement avec un équipage d’une vingtaine de personnes, sans compter des chiens, des chats, des oiseaux, des singes ou tout autre bête, si bien que les contemporains ont appelé le navire, l’Arche de Noé. L’arrivée dans les ports des compagnons de voyage de l'archiduc, bigarrés et hétéroclites, suscitait toujours une intense curiosité, ce qui se comprend parfaitement.
En même temps qu’à la navigation, il portait un intérêt particulier à l'étude scientifique des îles et des côtes non encore visités. À cet effet, il avait conçu un imposant questionnaire d’environ 100 pages du nom de Tabulae Ludovicinae qu'il remettait, arrivé à destination, à des personnalités cultivées qui y résidaient, par exemple le maire, le médecin, l'enseignant, le juge ou l’ecclésiastique. Il leur demandait de rassembler le plus grand nombre possible de données pertinentes dans le domaine de leur métier et de leurs connaissances. Louis-Savador s’est souvent adonné, accompagné de son secrétaire mallorquin Don antoni Vives et de guides connaissant bien le terrain, à de longues excursions pendant lesquelles il décrivait dans tous leurs détails, le paysage, la flore, la faune, la population et la culture de ses escales. Il avait toujours un petit calepin de la forme d'un globe, de quoi écrire et du papier. De cette façon, il s’est constitué une collection de croquis parfaitement maîtrisés qui illustraient ses descriptions. Louis Salvador a rassemblé toutes ces informations en de volumineux manuscrits qu’il a fait imprimer, à ses propres frais, chez l’éditeur pragois Mercy sous la forme de livres luxueux. Sur un tirage de 500 exemplaires en moyenne, l’archiduc offrait alors ces éditions rares à des amis, des collaborateurs et à d'autres personnes ou institutions intéressées par son travail.
Grâce à Leo Woerl, l’éditeur renommé de Berlin, quelques uns de ses ouvrages ont pu être trouvés en librairie. Les ouvrages scientifiques de Louis Salvador eurent rapidement une renommée internationale et il fut couverts de diplômes et de titres de membre d’honneur de diverses académies et institutions.
Il servit de modèle à son très bon ami Jules Verne pour le héros du roman Mathias Sandorf.

Le chercheur et le chroniqueur de la Méditerranée :

« Le plus grand chroniqueur de Méditerranée», souhaitait plus que tout éveiller l'intérêt du public pour des paysages qui, comme il s’en était rendu compte, étaient à tort peu connus et à peine parcourus. Son attention s'est concentrée, plutôt que sur les centres culturels classiques, sur les petites régions méconnues, comme par exemple les îles Paxos et Antipaxos,Ithaque, Leucade et Zante, Zakynthos dans la mer ionienne, ainsi que l'île Lipari appartenant aux Îles Éoliennes au nord de la Sicile,les petites îles du Giglio, Ustica et d’Alboran et en particulier celles qu’à l’époque (et qu’aujourd’hui encore on a du mal à s’en faire une idée), étaient largement inconnues, les îles Baléares.
Dès 1869 le premier ouvrage fut publié, et dédicacé par l’empereur François-Joseph. Il était composé de deux volumes double et de sept volumes simples, comprenant environ 6000 pages d’une œuvre monumentale Les Baléares. Description par le texte et par l’image (Die Balearen. In Wort und Bild geschildert). Pour cette œuvre, il reçut la médaille d’or pour l’exposition universelle de Paris en 1878. Presque tout y est représenté, dans cette monographie célèbre et inégalée jusqu’à ce jour dans sa variété : du plus petit coléoptère et de toute autre bête, toutes les espèces végétales dépendant du climat, l’histoire, le folklore, l'architecture, les descriptions de paysages jusqu'à la description détaillée de la population, par ses métiers, ses chansons, ses poèmes.

Entente cordiale entre les peuples :

Mais ce n'est pas seulement la Méditerranée qui fascinait l’archiduc voyageur. Les progrès de la technique, qui étaient mis en avant dans les grandes expositions universelles de cette époque, l’avaient particulièrement . En 1881 il se décida à visiter l'exposition universelle de Melbourne en Australie. Elle enthousiasma ce pacifiste, convaincu de l’effet de tels grands évènements pour promouvoir la paix . Dans son petit livre « quelques mots sur l’exposition universelle » paru en 1911- soit trois ans avant la déclaration de la première guerre mondiale – il écrit : « Combien de préjugés, combien d’idées toutes faites seront réduites à néant par la connaissance d’un autre peuple et de la vie dans son pays. J'affirme que si les différents peuples se connaissaient mieux, il ne se combattraient plus ». Il a également eu des idées visionnaires pour l'organisation des places à l’exposition universelle, comme par exemple l'exigence d’infrastructures accessibles aux handicapés (possibilité de circuler en chaise roulante).
Deux sensibilités communes
Une affinité particulière a réunit le vagabond royal et l’impératrice Elisabeth (« Sissi ») qui appréciait beaucoup chez l’archiduc sa culture et son excentricité. Elle l’invita deux fois sur son yacht « Miramar de Majorque »

Le Paradis à Majorque :

L’archiduc avait créé à Majorque un véritable paradis : petit à petit, tout au long de 30 années, il avait fait l’acquisition d’un bout de littoral, de 16 km de long et jusqu’à 10 km à l’intérieur des terres, entre Valldemossa et Deià. Sur cette terre généreuse, aucun arbre ne pouvait être abattu, aucune maison ne pouvait être construite, et tous les animaux (hormis ceux élevés dans des buts alimentaires) pouvaient y jouir d’une vie paisible jusqu'à leur mort naturelle.
Pour les touristes de cette époque qui voulaient voir cette côte extraordinaire, Louis-Salvador fit aménager spécialement une maison d'hôte, la Hospederia « Ca Madó Pilla », dans laquelle les voyageurs pouvaient être logés gratuitement pendant trois jours, sans les repas. De plus il aménagea un conduit de 12 kilomètres de long jusque dans les contreforts de la Sierra del Teix, lequel se fond avec bonheur dans le paysage encore aujourd'hui. Aux plus beaux points de vue, il fit ériger des « Miradors », petits murets avec des bancs, d’où l’on pouvait admirer la beauté de la côte et le coucher du soleil.

L’habit ne fait pas le moine :

A Majorque, d’innombrables récits courent encore de nos jours sur l’ « Archiduc », le très estimable roi sans couronne des Baléares. Ses habits particulièrement négligés étaient un signe caractéristique de Louis-Salvador. Il fréquentait volontiers la compagnie d’hommes simples, « desquels on peut apprendre souvent plus, que de la plupart des savants » et n’accordait pas d’importance particulière à son aspect extérieur. Il portait des costumes élimés ou de simples tabliers et, parfois, on le prenait, pour son plus grand plaisir pour un porcher, un marin, un cuisinier ou un ouvrier agricole.
Une fois, il reçut un pourboire d’un paysan mallorquin qu’il avait aidé à sortir sa charrette d’une ornière : « Mon premier argent qui soit vraiment à moi » comme il le raconta plus tard avec fierté. A la cour de Vienne, il passait pour un savant original doublé d’un communiste et l’on s’amusait beaucoup de son unique uniforme qui, avec les années, était tout rapiécé. L’archiduc répondait avec philosophie aux plaisanteries sur son accoutrement : « Mieux vaut la diversité que la monotonie ! »

Histoires d’alcôves :

Beaucoup d’histoires couraient autour de la vie amoureuse hors norme de l’archiduc. Il ne s’était jamais marié et avait succombé totalement, à la fois à l’attrait et à la beauté des majorquines. La fille d’un menuisier, Catalina Homar, prit une place particulière dans ce kaléidoscope amoureux. Sous les ailes de son mentor, elle bénéficia d’une excellente éducation, apprit plusieurs langues et devint intendante de son domaine viticole. La petite maison S'Estaca dont l'idée avait germé sur les îles Lipari, était au centre de leur vie. Dans les propriétés attenantes mûrissaient, entre autres, des raisins Malvoisier dont les vins firent glaner à l’archiduc et à sa vigneronne de nombreux prix dans des foires internationales, même en Amérique. Aujourd’hui, la maison est habitée par Michael Douglas, la star d’Hollywood, qui est un admirateur de l’archiduc et qui a mis en place le centre d’information « Costa Nord » à Valldemossa.

La fin d’une vie bien remplie :

Quand, en 1914, la Première Guerre mondiale éclata, une vie longue, créative, riche, inadaptée, remplie de liberté et d’amour, arrivait à son terme. A la demande express de l’empereur, l’archiduc Louis Salvador dut regagner le château de Brandýs nad Labem. Pendant que la guerre faisait rage et apportait son lot de chagrin et de douleur aux peuples impliqués, l’archiduc, déjà très malade, publia, comme en une protestation silencieuse, son dernier et touchant ouvrage « Zärtlichkeitsausdrücke und Koseworte in der friulanischen Sprache » (Expressions de tendresse et mots tendres en frioulan) « Magari un pagnut in dìe vuarê-si ben, benedete! » Un morceau de pain est bien suffisant si on aime quelqu’un, mon trésor !
Louis-Salvador mourut le 12 octobre 1915 à Brandýs nad Labem. Ce n’est pas dans sa propriété de Miramar qu’il affectionnait tant, là où les rayons du soleil auraient caressé sa tombe de leur lumière d’or, mais le « Diogène de noble extraction », comme l’écrivain espagnol Unamuno l’a nommé, repose, emmuré dans une niche de la crypte impériale(Kapuzinergruft) à Vienne.